A la veille du procí¨s des inculpés du 5 décembre 2009 [1], nous ne pouvons que constater qu’il y a toujours autant de chose í dire sur le chí´mage. Ce jour lí , date de manifestation nationale des chí´meurs et précaires, a sans conteste marqué les vies de ceux qui furent inculpés, blessés, traumatisés par un déchaí®nement de violence policií¨re. Ce que cet événement vint vérifier est que ceux qui s’organisent contre leurs conditions d’existence induites par les multiples gestionnaires de nos vies (tel que Pí´le Emploi), s’exposent í une répression portant un message on ne peut plus clair : « cantonnez vous í íªtre d’irréprochables demandeurs d’emploi, acceptez n’importe quel boulot que l’économie vous propose, ne vous organisez pas, estimez vous satisfaits que nous nous occupions de votre situation ».
Alors qu’on nous promet depuis peu de mettre les allocataires du RSA au travail 7 h/semaine sous peine d’íªtre privés de revenus, comment ne pas voir que les frontií¨res entre les institutions répressives et celle de la protection sociale tendent í disparaí®tre ? Cette perspective de mise au travail forcé ressemble fort aux travaux d’intéríªt général distribués í la pelle en correctionnelle. Simplement bénéficier d’un revenu de subsistance fait de nous des endettés, des suspects, des coupables en puissance. Etre compté parmi les précaires, de prétendre ne pas vouloir accepter n’importe quoi, se paie quotidiennement.
La naissance des institutions sociales en milieu capitaliste, a tenté de nous amadouer en nous promettant une prise en charge des questions de subsistance élémentaire, tout en nous bannissant sans cesse de ces questionnements, en nous assignant de coller í notre identité sociale et aux comportements censés lui correspondre. Nous ne sommes en rien responsables de la situation qui nous est faite, et pourtant, il nous faut certainement nous en ressaisir : affirmer que nous sommes chí´meurs parce que nous ne voulons pas fuir devant l’institution qui nous assigne í cette place, et parce que nous voulons commencer í décider des choses í partir de lí oí¹ nous sommes, í partir notamment de nos intéríªts communs désintéressés des logiques du capital. Pour autant, nous ne sommes pas que chí´meurs.
Un des traits de la culture ouvrií¨re a été le souci de s’organiser contre l’organisation capitaliste du travail et ses effets dévastateurs pour le prolétariat. Cela s’est notamment illustré par l’émergence des bourses du travail au 19í¨me sií¨cle, oí¹ furent créés de nombreux services tel que des caisses de secours mutuel pour venir en aide aux « abí®més » du capitalisme. Puis l’Etat en a fait des institutions sociales censées garantir des droits collectifs, afin de dépasser cet outil de classe, de l’élargir et garantir í tous (du moins dans les textes) un mieux íªtre. Le revers de cette médaille, est que ces míªmes institutions ont rapidement organisé la dépossession des capacités collectives qui en étaient í l’origine, pour en faire des monstres froids dont nous sommes í la merci. Lutter contre ces institutions qui se sont retournées contre nous sous la pression des logiques capitalistes (libéralisation, diminution des droits et renforcement de devoirs coercitifs ou de clauses restrictives qui entraí®nent l’exclusion de nombreux allocataires), voilí peut íªtre par oí¹ nous pourrions commencer. Pour décider et nous réapproprier ce qui nous importe et ainsi se ressaisir du comment nous voulons vivre.
Depuis 40 ans, ces institutions gí¨rent une crise permanente. On est passé d’un moment oí¹ on vendait notre force de travail, í une phase oí¹ il faut nous transformer en agents marketing de notre force de travail : íªtre un chí´meur productif c’est faire du relooking, accumuler un capital-compétences et booster son réseau. La réalité grandissante du chí´mage renvoie les dirigeants í la taille de leur mensonge. Pí´le Emploi n’est pas lí pour réduire le chí´mage mais les chiffres du chí´mage, ceux avec lesquels on fabrique les indicateurs qui servent í manipuler l’opinion, tandis que les portefeuilles des conseillers sont de plus en plus chargés. Peu importe que la violence qu’impose quotidiennement cette institution í ses usagers finisse par provoquer des éclats de violence en retour, comme tout récemment cette prise d’otage d’un dirigeant d’un pí´le emploi parisien. Reste í donner consistance au sentiment qu’il existe une communauté de tous ceux qui ne se satisfont pas de la gestion du temps de leur vie par Pí´le Emploi... la suite en découlera inévitablement.
MCPL - Mouvement des Chí´meurs et Précaires en Lutte
Réunion tous les mardis í 18h
22 rue de Bellevue, Bus 3 – arríªt Jeanne d’Arc, RENNES
RASSEMBLEMENT DE SOUTIEN AUX INCULPí‰S DU 5 DECEMBRE DONT LE PROCíˆS EN APPEL A LIEU ce mercredi 23 novembre 2011 í€ 15h00, RDV PLACE DU PARLEMENT
23/11/11 : Le procí¨s en appel a été reporté au 28 mars 2012