Si on reprend l’idée d’un processus du film qui se répète dans le spectateur, alors la définition du film par rapport à la réalité est plus ou moins égale à la définition du spectateur vis-à-vis du film. (...)
Atelier :
Le groupe Boris Barnet vous invite samedi 22 octobre à la Coordination des Intermittents et Précaires
14-16 quai de Charente ( M° Corentin Cariou ) à 14h30 (début 15h)
aux projections de « Sois belle et tais-toi » & de « Beppie »
Sois belle et tais-toi
de Delphine Seyrig, France, 1975-1977, 115 min
Delphine Seyrig interroge vingt-deux actrices (Marie Dubois, Juliet Bertho, Jane Fonda, Shirley Mc Laine, Barbara Steel...) depuis leurs expériences de travail. Bilan collectif plutôt négatif en 1976 sur cette profession qui ne permet que des rôles stéréotypés, aliénants, dans un monde où chaque décision passe par des hommes qui ont la main mise sur l’ensemble de la chaine cinématographique : Production, écriture du scénario, réalisation, distribution.
Ce que Delphine et ses camarades fabriquent, c’est quelque chose que l’on pourrait appeler « fraternité des métaphores ». En prenant l’apparition de l’outil vidéo comme un moyen d’enquête ; enquêter d’abord le temps qu’il fait parce que cet outil sert parfois à respirer voire à ralentir. Ainsi que nous l’avons constaté dans « France Tour Détour deux Enfants ». Ici point d’urgence ( ça coûte pas cher ) : Deux heures c’est peu pour prendre la température. La fièvre est retombée et l’heure est au bilan _ 1975-1977. Ce que nous entendons, c’est un chant, parce que le montage ; ce que nous voyons, ce sont des figures qui peu à peu deviennent familière à mesure que le film défait la légende. Que viennent les punks. Depuis, il n’y a plus de rôle à tenir, mais des emplois. En ce sens les acteurs et actrices ont été des précurseurs sans monde : « Les emplois que l’on me propose n’ont rien à voir avec la réalité de ce que nous vivons ».
« Inspirées par les mouvements féministes dont elles font parties, les vidéastes s’emparent dès le début des années 70 du matériel » dit « léger, le fameux portapack de Sony, qui permettait de tourner à deux, de se déplacer facilement et coûtait bien moins cher que la pellicule film. Les vidéastes n’occupent pas un poste d’observatrices et ne se contentent pas d’enregistrer des luttes ou un réel en mouvement. Delphine Seyrig comme Carole Roussopoulos, Ioana Wieder ou les femmes de Videa apportent leur touche singulière faite d’humour caustique, de questionnements politiques, d’engagement féministe pour offrir des images-cris ».
« De la dénonciation de l’attitude machiste de la C.G.T. au questionnement du » français moyen « sur sa vision des lesbiennes et des homosexuels, des conditions de travail des ouvrières d’une filature en Pologne au portrait d’une féministe américaine ou de prostituées françaises en grève, on retrouve la volonté marquée de laisser du temps à la parole, la richesse d’un cadre qui embrasse plus qu’il ne découpe, l’interpellation explicite du spectateur ».
&
Beppie
Johan van der Keuken, Pays-Bas, noir et blanc, 1965, 36 mn
Prise de vues et son : Ed et Gerda van der Elsken
Montage : Johan van der Keuken
Beppie a dix ans. La petite fille habite la même ville que Johan van der Keuken. Issue d’un milieu ouvrier, c’est une gamine d’Amsterdam, vive et espiègle, qui raconte au cinéaste ce dont est fait sa vie quotidienne et ce qui la préoccupe : la vie, la mort, la télévision, l’amour, l’argent...
KADO : les Séquences
1 [00.34] Générique
Il se déroule sur une musique de jazz. On entend la voix de Beppie qui arrive chez les van der Keuken et les salue.
2 [01.03] Fragments
Montage de plans d’Amsterdam et de fragments de Beppie : bague, chaussons, jambes.
Puis plans d’une maison avec Beppie, en duffle-coat, qui déboule sur l’écran.
3 [01.00] Sur le chemin de l’école
En passant, Beppie, rieuse, salue sa tante à sa fenêtre, puis elle gambade jusqu’à son école (la Frederik School).
4 [01.23] Beppie présente sa famille
Assise chez les van der Keuken, Beppie présente sa famille, les Klaassen : les sept sueurs de Beppie apparaissent en ordre croissant : Brigitte, Sylvia, Bernadette, Yvonne, Jopie, Josta et l’aînée, Lennie. Beppie présente aussi sa maison : la famille Klaassen vit dans six pièces. Elle-même partage sa chambre avec Josta. Souvent, la petite Brigitte pleure et vient s’endormir dans son lit.
5 [00.59] Beppie et les études
Beppie à son bureau d’écolière anonne, avec la classe, sa table de multiplication. Puis elle explique son rapport à l’école et au travail. Elle a redoublé et a eu un cinq pour bavardage. Quand elle réussit, elle reçoit une pièce.
6 [01.32] Beppie et le prix des choses
Le père de Beppie a une petite boîte à trésor où il met l’argent après en avoir donné à la maman. La fillette connaît le prix des choses : partir en colonie, son rêve, coûte 29 florins, mais les filles sont trop nombreuses pour partir toutes. La piscine coûte moins cher l’hiver. Beppie et son amie se goinfrent de frites.
7 [01.19] Les bêtises
Beppie raconte ses bêtises, tout en soupçonnant qu’on photographie à leur insu les tireurs de sonnettes. Elle s’en donne à cœur joie, avec sa bande, à se pendre aux sonnettes, de porte en porte.
8 [01.35] Les dangers de la ville
Lien : Beppie récite sa table. Elle raconte l’histoire de Johnny-le-fou qui a sauté sur le vélo d’une dame, puis elle passe au domaine des agressions : Lenie a eu peur d’un homme derrière des buissons et a voulu bifurquer, mais elle, Beppie, n’a pas eu peur. Quoique... elle a entendu dire par la mère d’Else (elle rit) qu’un homme s’était montré tout nu...
9 [01.57] Beppie et les relations amoureuses
Beppie et ses amis se promènent dans les quartiers des prostituées, les « travailleuses », comme les appelle l’enfant. Elle évoque les garçons, qui peuvent être méchants, puis se demande si sa mère l’autorisera à se marier. La mère de la chanteuse Caterina Valente l’en a empêchée : elle l’a vu à la télé.
10 [01.56] Beppie et la télé
La petite fille regarde tous les jours la télé et lorsqu’elle dort chez sa copine Else, elle est capable de passer la nuit à regarder des choses qui sont pour les grandes personnes.
11 [01.42] Jeux dans la ville
Après avoir répondu au maître qui interroge la classe sur les ponts-levis et les noms de rues, Beppie court dans Amsterdam avec sa bande, passant de rues en terrains vagues.
12 [01.25] La coupe de cheveux. La douche
Le coiffeur coupe les cheveux de Beppie au carré. La fillette est grave.
À la piscine, Beppie prend un intense plaisir à se débarbouiller sous la douche.
13 [00.52] Poursuites
Dans une course folle, Beppie escalade des rampes d’escaliers et raconte ses jeux : ses amis et elle jouent à chat en criant des marques de cigarettes...
14 [01.42] Parade de saint Nicolas
Beppie et les enfants assistent à la parade de la fête de saint Nicolas.
15 [01.10] Grand-père rétrécit
Beppie raconte comment elle a rencontré son grand-père qui lui a offert des bonbons quand elle pleurait. L’entant travaille près du vieil homme qui allume son cigare. Ses mains rétrécissent, dit Beppie.
16 [04.31] Prière et cinéma
Beppie et ses sueurs se rendent au patronage. Pour fêter Noël, on chante, on prie et on voit des dessins animés.
17 [03.22] Beppie, le cinéma et la vie
Sur le visage de Beppie spectatrice, on entend son analyse du cinéma : elle décrit ce qu’elle voit (dessins animés, pub, Ivanohë, etc.). Partant de l’extraordinaire Homme invisible, elle passe à la mort. Elle n’a aucune envie de mourir, ni d’aller dans le feu chez « Shell », ni au ciel, dotée d’une âme éternelle, à regarder passer les avions dans les nuages. Là-haut, il y a Dieu, l’homme invisible !
18 [01.33] Fin de séance
La séance de cinéma se termine. On fait réciter dés prières de grâce aux enfants en remerciement pour le bonheur, pour Noël, pour les cadeaux... Au-dehors, Beppie et les autres enfants jouent avec des bougies scintillantes.
19 [02.02] Amour et jalousie
Beppie parle de son amoureux, Hennie, qui l’a embrassée dans la pénombre d’un pont. Elle s’interroge sur la durée qu’aura leur relation, puis évoque Maria, une fille que tous les garçons aiment, sauf Hennie. La timide Maria raconte alors comment Beppie ne voulait pas qu’elle soit dans le film.
20 [04.18] Les parents de Beppie. Arrêt
La maman de Beppie, accablée par sa nombreuse progéniture, parle un peu de son enfance d’orpheline, faisant des ménages à dix-sept ans. Le papa, amoureux de la moto et totalement sûr de l’amour de ses filles, a les mains crispées et se dit comblé. Beppie, dont on voit les chaussons, décrète qu’il est temps de s’en aller. Le film se termine sur des images de la ville.