On nous dit qu’il faut faire des économies et que ces économies doivent se faire sur le bien commun ; c’est toujours la communauté qui coûte cher, qui gabegie, déficite et abuse...
Le Medef, soutenu par la CFDT, a proposé en décembre une proposition d’accord sur l’assurance-chômage (Unedic) 2009 -2011, qui dicte, sous couvert de simplification et d’équité, une baisse programmée des cotisations salariales, ainsi que de la durée et du montant des allocations.
Pour l’instant, parmi les partenaires sociaux, seules les organisations patronales et la CFDT sont signataires de cet accord. Ni la CGT, ni FO, ni la CGC, ni la CFTC n’ont avalisé un texte qui prévoit de diminuer encore les moyens disponibles pour la protection sociale des chômeurs - dont la moitié seulement sont indemnisés.
En outre, la CGT, FO et la CGC annoncent qu’elles s’opposeront formellement à l’agrément de ce texte devant le Conseil de l’emploi qui doit le valider avant une éventuelle adoption. De nouveau, l’Unedic est en crise, juste retour du boomerang si l’on considère la faiblesse des droits déjà si chichement concédés. La convention actuellement en vigueur est prolongée jusqu’au 15 février : soit le gouvernement passe en force et endosse la responsabilité de la prochaine convention Unedic, soit une nouvelle négociation s’ouvre.
Contre une logique de devoirs, individualisante et culpabilisante que l’on cherche à nous imposer, contre l’organisation de la rareté, défendons une logique de droits collectifs et sans contrepartie.
Tout a un coût. Ce n’est pas une question d’économie, c’est une question de point de vue : des logements sociaux ou un accès individuel à la propriété financée par un crédit à risque (subprime), une couverture sociale solidaire financée par un système de cotisation mutualiste et de nouvelles ressources, ou un principe d’assurance individualisée avec constitution de capital individuel.
L’habitude voudrait qu’il faille se soumettre aux marchés. Et quand ceux-ci s’écroulent, terrassés d’EPO boursières, la société devrait se précipiter à leurs chevets ! Veillons le malade ! Et acceptons encore quelques sacrifices : si ceux qui encaissent les dégâts collatéraux de cette politique (les salariés, les chômeurs, les précaires, les moyens et petits revenus, les usagers, les consommateurs) ne sont, bien sûr, pas Coupables, il ne faudrait pas qu’ils se croient Innocents.
On nous dit qu’il faut faire des économies et que ces économies doivent se faire sur le bien commun ; c’est toujours la communauté qui coûte cher, qui gabegie, déficite et abuse, quand l’entrepreneur prend des risques et fait les erreurs qu’il faut - tous ensemble ! tous ensemble ! - rattraper.
Aujourd’hui les politiques en matière de couverture sociale suivent encore et toujours la même logique de destruction, d’atomisation et de culpabilisation. Les prix augmentent, la capacité de subsister diminue. Partout les structures qui n’ont pas le profit pour vocation - recherche, éducation, santé, culture - voient leurs budgets amputés pour cause de manque d’argent. Le patronat, le gouvernement, bref ceux-qui-ont-le-volant invoquent la faute à pas-de-chance pour justifier la pseudo crise intrinséco-financière qui booste les chiffres du chômage et nous annoncent, plus ou moins désolés et compatissants, mais si dynamiques, des moments difficiles. Ils prescrivent une baisse des indemnités chômage via la baisse des cotisations sociales, une réduction des allocations et l’application de minima sociaux visant à forcer au retour à l’emploi précaire, les pauvres, les asociaux et les marges. C’est le Revenu de Solidarité Active.
Les conditions d’accès aux couvertures sociales atomisent la masse des demandeurs. Avant d’avoir droit à, il faut prouver sa bonne foi et, si l’indemnité chômage s’en tient aux fiches de paie et aux contrats, le RMI, bientôt RSA, inspecte votre compte en banque, surveille votre intimité (êtes-vous concubin ? êtes-vous aidé par un parent ?), répertorie vos biens et vous interdit tout autre revenu sous peine de diminution ou de suppression de l’allocation de 395€/mois. Dans cette logique de suspicion et de contrôle, il vous faudra toujours prouver que vous n’êtes pas le fraudeur qu’arbitrairement on vous suspecte d’être. Quand on ne vous réclame pas des indus, à Pôle emploi ou à la CAF, on vous pousse à la dette individualisée. On vous prête de l’argent pour que vous montiez votre boîte, que vous rejoigniez la grande famille des entrepreneurs, ceux qui réussissent. C’est la logique Madoff, bientôt l’allocation revolving ! L’accord Unedic prévoyait initialement une allocation spécial-jeunes, versée une seule fois, et remboursable sur de futurs droits... L’accord actuel est présenté comme un progrès car il prévoit d’ouvrir des droits après 4 mois d’emploi. Ce que l’on dit moins c’est qu’ouvrir droit au chômage après quatre mois d’emploi ne sera souvent possible qu’une seule fois : en cas de retour au chômage dans l’année, la durée d’affiliation exigée serait cette fois de 6 mois. Or la durée moyenne des CDD est de deux mois et le CDD représentent 7O% des embauches. Mais il ne faudrait pas abuser du chômage, veillons-y.
La même logique du soupçon fait se multiplier les contrôles subis par les compagnies de théâtre, libres entreprises s’il en est. Le cas banal où le responsable d’une petite compagnie en est aussi l’employé (directeur artistique-metteur en scène-comédien ) suffit aux petits inquisiteurs de la bureaucratie des Assedics pour suspecter et contrôler ; des contrôles qui vont parfois jusqu’à la descente de police avec menotage ou rappel de trop perçu sur 10 ans. Pratiques d’intimidation, pratiques de culpabilisation. Les pauvres coûtent trop cher aux riches qui les génèrent.
C’est le moment de (re)parler de partage des richesses, de gestions répartissantes, de principes mutualisateurs plutôt qu’individualistes. Que peut-on faire pour inverser la logique actuelle, et imposer d’autres choix ? Quand les modalités d’emploi élargissent l’usage de la discontinuité (le CDD de très courte durée) à tous les domaines de l’économie, des réformes (et non des contre-réformes comme celles, à l’œuvre, des retraites, du temps de travail, de l’école, de la santé) inspirées du régime d’indemnisation chômage des salariés intermittents du spectacle seraient une réponse à la précarisation de l’ensemble des salariés intermittents. Lutter pour le maintien de ce régime, son amélioration et sa généralisation à tous les intermittents de l’emploi, c’est lutter contre le cas par cas, la professionnalisation normalisatrice préconisée par les décideurs et la sectorisation à outrance, c’est exiger une continuité de revenu pour tous.
Nous ne serons pas moins intermittents du spectacle si nous gagnons une reconnaissance des droits des intermittents du bâtiment, des centres d’appel et d’ailleurs.
Les propositions des Coordinations d’intermittents et de précaires avec le Nouveau Modèle d’indemnisation du chômage des salariés à l’emploi discontinu, la plate-forme du Comité de Suivi avec Annexe Unique, Date Anniversaire, plancher et plafond d’indemnisation sont des éléments substantiels d’une négociation à venir, si celle-ci assumait enfin les enjeux réels de la situation de l’emploi au lieu de jouer au bonneteau avec nos vies. Aujourd’hui, une base minimale nécessaire à la convergence offensive susceptible de réunir dans la lutte différentes figures de la précarité (des l’intermittents du spectacle aux chômeurs de longue durée, des allocataires des minima aux 700 000 chômeurs « en activité à temps réduit » qui perçoivent à la fois du salaire et de l’allocation-chômage) estl’exigence que chaque jour chômé soit indemnisé au minimum à hauteur d’un SMIC/jour.
Face à l’atomisation des ayants droits (actuels ou potentiels), en réponse au cas par cas généralisé, nous pouvons nous organiser, réfléchir ensemble, lire et comprendre les circulaires et les institutions auxquelles nous faisons face, élaborer des moyens d’action, construire des forces de lutte et de proposition. Les mouvements passés (lycéens et étudiants, chômeurs et précaires, infirmières, cheminots, intermittents), en constituant des coordinations, en luttant par delà les appartenances syndicales et les contraintes représentatives de ces organisations, ont su ouvrir du possible. Issue de ces mouvements, la coordination des intermittents et précaires (idf) est l’un des lieux à partir duquel faire émerger ces possibles.
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CIP-IDF (Coordination de intermittents et précaires d’Île de France), 14-16 quai de la charente 75019 Paris, M° Corentin Cariou, Tel 01 40 34 59 74
Ce n’est pas la richesse qui manque, c’est la politique ! Voir : Contre la vie chère : Ni Casino, ni Unedic, tout pour tous ainsi que La GRÈVE DES HAMSTERS. Quelle politique pour nous sauver de l’économie ? (Mouvement des chômeurs et précaires en lutte, Rennes)
Nous sommes tous des irréguliers de ce système absurde et mortifère, l’éditorial et le sommaire de L’Interluttants n°29, hiver 2008/2009
Lutter est nécessaire, lutter construit la puissance du nous. Mobilisons-nous pour de nouveaux droits sociaux
Nous sommes tous des irréguliers de ce système absurde et mortifère., l’éditorial et le sommaire de L’Interluttants n°29, hiver 2008/2009
Pour ne pas se laisser faire, agir collectivement :
Permanence CAP d’accueil et d’information sur le régime d’assurance-chômage des intermittents du spectacle, lundi de 15h à 18h. Envoyez questions détaillées, remarques, analyses à cap cip-idf.org
Permanences précarité, lundi de 15h à 17h30. Adressez témoignages, analyses, questions à permanenceprecarite cip-idf.org
À la CIP, 14 quai de charente, Paris 19e, M° Corentin Cariou, ligne 7, Tel 01 40 34 59 74