On peut se demander pourquoi il importe de se battre pour l’art, la culture, la
connaissance, la recherche, alors qu’une attaque brutale contre le droit à pension de retraites vise une population apparemment résignée, des individus isolés dans leur peur de l’avenir.
On redoute qu’à terme chacun se résignera pour les retraites à un accord entre la CFDT, le Medef et le gouvernement signé sous l’argument « qu’on ne peut pas faire
autrement ». La CFDT proclamait déjà en 2003 avoir "sauvé le système par répartition
des droits sociaux des artistes et des techniciens", en 2010 elle se glorifiera d’avoir
préservé le principe du droit au départ à la retraite pour tous au même âge.
Cette question d’âge n’est pas ce qui inquiète le Medef : le but est de casser le système par mutualisation, ou de le dégrader suffisamment pour pouvoir à terme y substituer un système d’assurance privé. L’autonomie économique des retraités, voilà précisément ce qu’ils veulent aujourd’hui éviter, tout comme en 2003, ce qu’ils
reprochaient profondément au système de l’intermittence, c’était d’ouvrir des espaces de liberté aux artistes et aux techniciens au sein de leur emploi.
L’idéologie libérale dont les partisans sont au pouvoir actuellement s’attache à dominer la population, par le biais notamment d’une dépendance économique, en enfermant les individus dans un état de précarité, plus ou moins sensible, mais qui toujours conditionne la façon de vivre et de penser. Se bâtit ainsi une nouvelle culture de l’entreprise qui gangrène insensiblement les esprits de tous.
Oui, la culture est en danger. Pas uniquement celle défendue par le ministère du même nom. Toute la culture du bien public, de la solidarité, entre les générations et les individus. Le danger à terme n’est pas la disparition de la culture, mais la forme de culture qui sera proposée à tous.
On peut l’imaginer sans peine en observant le sort réservé aux soignants des hôpitaux, aux postiers, et bientôt aux retraités. Un service public dégradé gangrené par des espaces privés qui sont systématiquement proposés en alternative pourvu qu’on ait les moyens de se les payer. Pour ceux qui le peuvent, les cliniques, les services de distribution express, les retraites privées pour les autres, « le pain le plus noir et l’eau la plus claire », c’est à dire le minimum pour assurer la paix sociale et sauvegarder les apparences.
La culture au sens de celle qui est liée aux productions artistiques est aussi un bien
commun fondamental. Mais les fondations du service public de la culture sont sapées par le gouvernement actuel. De façon générale, les crédits dédiés à la culture sont réduits. D’abord au ministère de la Culture, où rôdent les experts de Cap Gemini traquant les « lieux de résistance au changement », et qui à terme sera réduit à l’impuissance par l’application de la Règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Mais aussi dans les collectivités territoriales prises à la gorge par la disparition de la taxe professionnelle d’une part, et la politique de rigueur annoncée, sur laquelle chacun est invité à s’aligner, d’autre part.
Depuis 2003 on assiste au durcissement des conditions pour entrer dans le régime d’assurance chômage des intermittents (ces gens payés à ne rien faire grâce aux
cotisations des vrais travailleurs !). Aujourd’hui s’y ajoute une diminution des budgets des employeurs actuels ou potentiels.
Pratiquement, entre travail alimentaire, obligations administratives et assèchement des ressources des bailleurs de fond, la précarité se banalise dans la culture.
Les solidarités sont brisées en imposant une concurrence de tous contre tous. On doit passer son temps à essayer d’être plus compétitif (plus qu’hier, plus que les autres). Et on doit chercher à atteindre cette excellence dans des cases qui nous sont imposées. Il n’est plus permis, on n’a plus le temps, plus le loisir de se concentrer sur une émancipation personnelle.
Michelet écrivait : « mettez les arts dans les mains du peuple, ils deviendront
l’épouvantail des tyrans ».
Il est indispensable de se mobiliser pour défendre la culture, défendre le droit à choisir la culture que l’on veut !!!
Il existe encore des résistances à cette société entreprise, à la guerre de tous contre tous, au management entrepreneurial qui tend à s’infiltrer partout, des grosses entreprises jusqu’aux plus petites, dans la gestion des droits sociaux (assurance-chômage, RSA) et jusque dans l’ensemble de la vie.
Il est indispensable de défendre et favoriser ces pratiques de résistance,
d’émancipation.
Un lieu de lutte et de résistance est aujourd’hui menacé de disparition : la coordination est menacée d’expulsion. Signez, faites signer, la pétition en ligne en défense de l’existence de la Cip : Nous avons besoin de lieux pour habiter le monde
Suite à l’appel à la grève des chômeurs de la coordination des
collectifs de chômeurs et précaires, des collectifs se créent ; prenons part à ces luttes !
Ce que nous défendons nous le défendons pour tous
17 Juin 2010
Coordination des Intermittents et Précaires - 14 quai de charente - Paris 19 - tel : 01.40.34.59.74 accueil cip-idf.org
SUD Culture - 12, rue de Louvois - PARIS 2 - tel : 01.40.15.82.68 - sud culture.fr
Appel de la CIP : en fin de la manifestation, rdv à 12h30 devant le ministère de la Culture pour aller exiger de la ville de Paris de réelles propositions pour le relogement de la Cip-idf.
Permanence CAP (pour les intermittents) : cap cip-idf.org
Permanence précarité (pour les autres) : permanenceprecarite cip-idf.org
Le lundi de 15h à 18h à la CIP-IdF, 14 quai de charente, M° Corentin Cariou, ligne 7
Le mot « culture » dérive de « colere »