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Soirée des Molières : ils sont venus nous chercher car ils ont peur.

Publié, le mercredi 4 juin 2014 | Imprimer Imprimer |
Dernière modification : jeudi 5 juin 2014


Ces gens là, ce n’est pas la misère qu’ils craignent, ce n’est pas que 6 chômeurs sur 10 ne soient pas indemnisés aujourd’hui et encore plus demain [1], ce n’est pas que 9 millions de personnes soient touchés par la pauvreté, que l’extrême droite fasse des ravages, que les médias manipulent, c’est seulement que leur émission soit perturbée.

Ils ont peur que l’intervention de la réalité sur la scène de leur cérémonie ne soit trop dure pour qu’ils puissent la regarder en face, pour qu’ils puissent se regarder en face. Alors après être venus nous chercher, ils ont tenté de nous dicter ce qu’il y avait à dire et à faire, de négocier nos propositions, de dealer la réalité, de masquer la précarité.

Mais nous ne sommes pas là pour jouer, il ne s’agit plus de divertir. La dernière charte de notre mouvement précise qu’il n’y aura pas de spectacle en présence des membres du gouvernement, ce gouvernement qui soutient nos propositions quand il est dans l’opposition et qui est prêt à les renier aujourd’hui pour se mettre à la botte du MEDEF [2]. Alors Mme Filipetti, Messieurs du gouvernement, le ton est à la gravité. S’il y avait un Molière à vous offrir, à vous et votre gouvernement ce serait celui de la meilleure trahison.

Si nous sommes ici, ce n’est pas pour sauver une profession par le biais d’une cérémonie d’autocongratulations, si nous sommes ici, c’est pour avoir une parole politique. C’est une parole en lien avec les actions qui ont lieu ici et ailleurs tous les jours et ce depuis des mois, pour défendre des droits pour tous, pour en gagner de nouveaux [3], pour mettre le gouvernement face à ses contradictions et ses responsabilités.

Nous sommes ici car nous nous opposons à l’agrément par le gouvernement de cet accord sur l’assurance chômage qui n’est pas le fruit d’un dialogue social [4] et dont les conséquences seraient catastrophiques pour l’ensemble des travailleurs. Si cette cérémonie était réellement là pour promouvoir le théâtre, il s’agirait de défendre les droits de ceux qui le font. Le théâtre ce n’est pas un petit spectacle ronronnant pour oublier qu’on se laisse asservir, que l’on devient sourd et aveugle à ce qui nous arrive et à ce qui nous entoure. Le théâtre c’est le reflet du monde : si ce qui se passe dans le monde est de la merde, vous vous devez de la ramener sur scène et de ne pas tenter de la masquer par des sacro-saintes paillettes.

Les droits que nous défendons, ce sont ceux de tous. Si nous sommes là aujourd’hui, ce n’est pas parce que vous êtes dans un théâtre, ni pour le théâtre mais parce qu’il y a des spectateurs et des téléspectateurs auxquels nous souhaitons parler, parce que nous souhaitons que le gouvernement finisse enfin par entendre le mécontentement de ceux qu’il trahit. Vous êtes un moyen et non une fin. Et tant que nous ne serons pas entendus, nos actions ne connaitront pas de pause.

Une intermittente


Voici la déclaration lues à la cérémonie des Molières, devant plus d’un million de personnes et en présence de Filipetit. Qui peut encore sans mauvaise foi faire mine de croire que la question posée peut être bornée au sort des intermittents du spectacle comme si il s’agissait d’un isolat social ?

Le gouvernement s’apprête à ratifier la convention d’assurance chômage négociée contre les intermittents, intérimaires, chômeurs en toute déloyauté.

Ce nouvel accord réduit encore une fois les droits des plus fragiles pour, nous dit-on, faire des économies parce que les chômeurs coûtent trop cher. Il faut donc trouver un moyen de les faire payer. Leur faire payer le fait qu’en France 6 chômeurs sur 10 ne sont pas indemnisés, leur faire payer les 9 millions de pauvres, travailleurs ou non, leur faire payer la situation de chômage de masse avec près de 6 millions de privé d’emploi. Ce texte fait porter sur les seuls intermittents, intérimaires et chômeurs les 2 milliards d’économie en 3 ans que le gouvernement demande au régime d’assurance chômage. Cette volonté de partenariat avec le Medef est un massacre.

Cet accord va aggraver la situation de tous ceux qui vivent la précarité au quotidien. Nous avons bien conscience que beaucoup de professions sont en danger, pas seulement les nôtres et en luttant ensemble nous affirmons notre totale solidarité.

Avant d’arriver au pouvoir, tous les membres du gouvernement soutenaient nos propositions. Nous voulons simplement que les actes suivent les paroles.
François Rebsamen, qui nous défendait juste avant de devenir ministre du travail, se renie et annonce qu’il va agréer cet accord inacceptable. A ce titre il mérite le Molière de la meilleure trahison pour son rôle d’employé du Medef.

Dans le contexte de politique d’austérité, les budgets de la culture sont, comme bien d’autres, soumis à des coupes drastiques. La colère, le désespoir mais surtout la détermination vont entrainer des mobilisations dans tous les festivals d’été.

Les salariés permanents et intermittents du festival Le Printemps des Comédiens à Montpellier viennent d’adresser un ultimatum au gouvernement qui expire aujourd’hui à minuit - sans promesse de non agrément et réouverture des négociations sur l’assurance chômage, ils se mettront en grève reconductible dès demain [5].

Les membres du gouvernement ne seront pas les bienvenus dans nos spectacles.

Luttons et résistons.



Notes :

[1[1] Pour qui n’aurait pas tout à fait saisi encore quel est le projet patronal et gouvernemental, appuyé par la CFDT et d’autres « syndicats », un résumé limpide à faire circuler partout : Deux millions six cent mille privilégiés en France. Combien de temps ce scandale va-t-il durer ? Tract.

[3Des drois qui répondent à nos pratiques d’emploi, voir Contre-propositions pour une réforme de l’assurance-chômage des salariés intermittents, des droits qui permettent d’en finir avec la non indemnisation de la majorité des chômeurs, intermittents ou non.

[5La grève a donc débutée à Montpellier, voir : Vive la grève au Printemps des comédiens à Montpellier !.



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