Jeudi 17 juillet, nous, chômeurs, précaires, intermittents, intérimaires, avec ou sans papiers, avons occupé l’une des agence Pôle emploi de la rue Vic d’Azir. Nous n’avons pas jeté notre dévolu sur l’agence Pôle dédiée aux intermittents du spectacle qui se trouve également dans cette rue, mais vers celle « tous publics ». Nous souhaitions échanger avec le personnel et les usagers (ceux que Pôle emploi nomme « candidats » dans nombre de ses textes [1]) sur l’application en cours de la convention d’assurance chômage agréée par le gouvernement le 26 juin dernier.
Cette convention anti-chômeurs est en vigueur depuis le 1er juillet, nous souhaitions en savoir plus sur son application en allant enquêter collectivement sur place.
Parmi les premiers problèmes rencontrés : la formation du personnel. Après une demi-heure de tractage [2], nous avons appelé à participer à une AG commune les salariés de l’agence et les chômeurs et précaires présents.
Mais à l’arrivée du directeur des agences Pôle emploi du 10ème, les agents se sont vus donner l’ordre de se retirer dans leurs bureaux sous couvert d’application de consignes de sécurité. L’agence a ensuite été fermée sur ordre de la direction... La mise en concurrence généralisée se doit d’interdire toute forme de démocratie réelle. Dans le cas de Pôle emploi, on a souvent vu lors de telles visites collectives des directions décréter un « droit de retrait » en lieu et place des salariés. Le 39 49 ce n’est pas une technique dépourvue de signification et d’implication politique mais bien un dispositif emblématique de l’ordre social, que signifie cette mise à distance imposée ? La socialisation, ce que la société détermine de la vie de tel ou tel, a pour contenu concret la séparation [3].
C’est dans ces conditions qu’un dialogue s’est instauré, sans les agents mais avec le directeur, une référente technique formation et un encadrant du personnel...
On nous dit alors que le personnel de Pôle emploi n’a pas reçu la même formation suivant qu’il fait partie des « liquidants » (anciennement ASSEDIC) et des non liquidants (ex-ANPE). Deux jours dans le premier cas, une journée pour les autres. Mais, dans les deux cas, ces formations étaient assurées par des formateurs qui ne semblaient pas connaître l’ensemble de la convention actuelle et moins encore son détail. L’encadrant du personnel a d’ailleurs reconnu que ces formations avaient débuté avant l’agrément de la convention par l’Etat et qu’elles avaient été « bricolées par bribes ». Un complément de formation, d’une durée plus courte, aura lieu à la rentrée. Dans l’intervalle, un forum interne a été ouvert pour recueillir les questions en suspens et récurrentes sans que n’y soit cependant apportée de réponse.
Nombre de nos questions ont reçu des réponses imprécises.
Ainsi, concernant les dossiers traités entre juillet et fin septembre qui risquent de générer des indus et/ou des trop perçus, le directeur de l’agence n’a pas d’idée sur la question.
Concernant les droits rechargeables (fonctionnement, automaticité) nous ne sommes pas d’accord sur ce que cela entraîne pour les chômeurs. Contrairement à ce qui se faisait jusqu’alors, un contrat mieux rémunéré au cours de la période d’épuisement du « capital de droits » ne pourra pas changer le montant de l’indemnité.
C’est à l’épuisement total de ces droits ouverts (un « capital ») qu’interviendront, automatiquement et sans dépôt de dossier, les droits rechargeables. Il faudra avoir travaillé au minimum 150 heures pour pouvoir recharger ses droits. C’est donc la course aux petits boulots qui va s’amplifier ! Du pain béni pour les employeurs (en 10 ans l’utilisation du CDD de moins d’1 mois à plus que doublée !)...
Les activités salariées effectuées pendant une période d’indemnisation, sont rechargées sur le même régime que l’ouverture de droit. Cela exclut les possibilités de calquer les droits sur les caractéristiques des emplois (intérim, intermittence spectacle ou hors spectacle...). De plus, ces activités sont neutralisées pour toutes ouvertures de droits ultérieures, empêchant ainsi l’entrée dans des régimes spécifiques et adaptés.
Le directeur a d’abord tenté de nous convaincre que les droits rechargeables étaient bénéfiques pour les chômeurs et contestait l’automaticité. En réalité, il semblait peu informé sur ce sujet et n’avait visiblement pas lu le texte de la convention à ce propos.
Après deux heures et demie d’occupation et peu de réponses à nos questions, nous avons décidé de quitter l’agence en promettant d’y revenir.
Chômeurs, précaires intermittents de l’emploi, ce que nous gagnerons nous le gagnerons pour tous