dimanche 14 septembre 2003
Dernière modification : vendredi 3 octobre 2003
La semaine dernière, une centaine de personnes se sont donné rendez-vous
pour saturer l’espace commercial du Monoprix de la rue du faubourg du
temple à Paris. Explications.
Qui êtes-vous ?
Paul Tourtelle & Natalia Imbroglio du comité pour la free party au
supermarché
Qui sont vos maîtres à penser ?
PT : A défaut de maîtres à penser, les personnes et organisations
suivantes peuvent être considérées comme des références pour ce type
d’oeuvre : l’internationale situationniste, Machiavel, Edouard Leclerc,
Arthur Cravan, Dada, T.Mariani.
NI : Guy Debord, Michel de Certeau, Hakim Bey.
Pourriez-vous nous raconter ce qui s’est passé au monoprix de la rue du
faubourg du temple vendredi dernier ?
PT : A 20 h un signal sonore à retenti et les participant se sont saisis
d’un article dans les rayons l’ont brandi et la FREEPARTY AU SUPERMARCHE
a commencé. Des performeurs, des artistes et autres acteurs ont joué,
occupé le supermarché. Le lieu est devenu une sorte de bordel
euphorique... Nombre de participants ont regardé, parlé, rencontré, joué à
être au supermarché pour ne pas faire leurs courses. A 20h 10 la police
est arrivée, a enfermé dans le bâtiment ceux qui y étaient et empêché
d’entrer les autres. Les dernières actions se sont achevées vers 20h 30
et une bonne partie des participants sont passés à la caisse (une rumeur
a couru : " ils ne te laissent pas sortir si tu n’achète pas un article !)
Une fois tout le monde dehors, une discussion cordiale s’est tenu avec
la police à propos de l’événement.
Extrait de cette entrevue entre le chef des forces de l’ordre et le chef
des forces de vente qui m’a été rapportée par une des participantes :
le flic : il y a des dégradations ?
la caissière : non.
le flic : il y a des vols ?
la caissière : non.
le flic : alors pourquoi vous avez fait venir 30 policiers ?
NI :Le happening artistico-spectaculaire pluridisciplinaire a eu lieu
dans les rayons, les artistes-performers ont été très inventifs et très
brillants, tout le monde était hystérique.
Nos mots d’ordre ont été suivis : Aucun vol, aucune détérioration,
c’était très important, nous devions être légalement irréprochables pour
être efficaces.
Pourquoi éprouvez-vous le besoin de « saturer l’espace commercial » ?
NI : Comme ça
PT : Ce n’est pas un besoin mais la volonté saturer l’espace commercial
par des non-clients est une réponse à la saturation de notre espace de
vie par la publicité et le commerce. C’est aussi l’exploration d’espaces
de liberté et des marges législatives.
Pourquoi employez-vous le terme de freeparty ?
Nous employons le terme de freeparty pour son sens littéral, à savoir :
fête libre.
Faut-il envisager ce terme dans sa connotation « techno » ?
Si la freeparty au supermarché dépasse à mon sens le cadre de la techno,
la situation dans laquelle se trouve les « teuffeurs » est assez
exemplaire. Organiser des fêtes en dehors du circuit commercial est à ce
point scandaleux que les pouvoirs publics ont tenu à interdire ces
pratiques. En effet, l’enjeu des free parties dépasse la musique techno
et sa consommation : ce sont pratiques et des choix de vie bien
« encombrants » qui gênent : nomadisme, drogue, internationalisme,utopie,
etc.
NI : Pour jouer sur les mots, c’est à la fois significatif de liberté
d’action et d’éclectisme, et une référence aux free parties tekno.
Quelle est la finalité de ce type d’intervention ?
PT : C’est une oeuvre d’art.
NI : Donner le pouvoir à chacun de changer le décor, parce que l’union
fait la force. Montrer qu’on peut être un créatif festif anarchique
grâce au nombre lui aussi créatif festif anarchique. On recherche un
phénomène de contagion à court et long terme.
Quelles types de réaction espérez-vous provoquer ?
NI : Un mouvement.
PT : De l’enthousiasme !
Quelles structures / organisations auraient selon vous bien besoin d’une
petite intervention de ce type selon vous ?
PT : celles qui ont un gros logo !
NI : Les musées !
L’art trouve-t-il une réelle pertinence hors des galeries ?
PT : Evidemment, au musée par exemple ou dans un ascenseur ou dans ta
salle de bain, dans des livres et même dans les télévisions... "Ce sont
les regardeurs qui font les tableaux."
NI : Pourquoi non ?