jeudi 4 décembre 2003
Dernière modification : jeudi 14 avril 2005
le 29/11/03, fdanos a écrit :
Vendredi 28 11 03, 20h30 centre georges pompidou, spectacle d’Emmanuelle Huyn
lecture de la « lettre public » à la demande de la chorégraphe.
Parce que le spectacle commence dès l’entrée du public dans la salle, la
lecture doit se faire dans le hall. Pas de sonorisation, pas de logistique.
Je rencontre Emmanuelle Huyn et lui dit mon intention de commenter, en plus
de la lecture, le lieu et les conditions de celle-ci. Elle prouve cela
inopportun, pas moi, elle oui, pas moi, elle oui, pas moi, elle finit par
dire "fais comme tu veux et part fâchée.
Elle n’a pas prévue de réunir elle-même les spectateurs autour de la table sur laquelle je suis monté.
J’ai apporté des tracts (quelle politique culturelle, affaire juridique,
l’interpellation d’Aillagon à Montreuil) et préparé une introduction au
texte (ci-dessous) : qui je suis (étranger à la troupe), tout ce que
j’aimerais dire, la limite d’une lecture... Ca sert beaucoup, ça capte
l’attention, j’en rajoute sur les infos. On m’applaudit.
le conseil d’oncle coin-coin
Ce genre de situation est symptomatique : les créateurs au travail nous
invitent à nous exprimer autour, dans, après leur spectacle, mais ne veulent
pas que cette intervention ne perturbe en quoi que ce soit leur joli
objet. Ils ne pensent pas à mettre en balance (à mêler ?) leur travail,
place, discours avec la contestation.
Une simple intro personnelle au texte peut déstabiliser en partie cet état de fait.
—
frédéric
Bonsoir,
Je vais vous lire un texte à propos du conflit des intermittents mais ma
position, là debout sur une table dans le hall est un peu bizarre. Le
parti-pris esthétique du spectacle que vous allez voir impose cette
situation. Bon, je vais essayer de faire avec.
Je m’appelle Frédéric, je milite à la CIP-IDF. Je suis ouvrier, peintre
patineur dans le cinéma. Je suis également plasticien (j’ai exposé ici à
Beaubourg), touriste, comédien et à l’occaz preneur d’otage.
Je vais vous lire un texte, un appel à mobilisation autour du problème du
régime d’assurance-chômage des intermittents en particulier, de la casse des
droits sociaux en général.
Bon le texte est là, mais je voudrais être sûr de faire le tour de la
question. Ce papier sera-t-il suffisant ? Je ne sais pas par quoi commencer.
La teneur des accords, leurs absurdités quant aux conséquences sur la vie
culturelle mais également économique, le tripatouillage des signataires et
du gouvernement pour contourner une décision de justice à venir et faire
passer le texte, leur refus du débat (sont-ils trop sûr d’eux ou pas assez
?), la liste des droits et services mis à mal par le gouvernement, le
directeur de la librairie Flammarion ici-même au rez-de-chaussée qui répond
« je n’en vois pas l’utilité » aux grévistes qui réclament un treizième mois
; mais aussi, les nouvelles organisations du travail, les réponses à
l’inéluctable flexibilité/discontinuité, notre rapport au temps libéré,
l’organisation de ce temps, des loisirs, le sens du mot culture.
Ou encore une explication du « faire payer les pauvres, donner aux riches » ou du « la culture aux riches, la télé aux pauvres » ; ou bien, la grève ou pas la
grève, jouer ou pas, comment jouer, comment lutter...la liste est longue, trop
longue.
Vous trouverez des documents, des tracts qui vous informeront, ou tout du
moins vous donneront une version du truc.
Cher public,
Le spectacle que vous allez voir ce soir est le fruit du travail
d’artistes regroupés au sein de la compagnie MUA/Emmanuelle Huyn ,
danseurs, éclairagiste, ingénieur son cinéma, régisseurs son.
Ils exercent leur métier grâce au régime d’assurance-chômage d’intermittent du spectacle et ont éprouvé le besoin de s’adresser à vous :
Dans l’urgence, une parole nécessaire doit circuler entre nous, entre vous,
entre tous.
Aujourd’hui, nous avons peur que ce qu’il reste de commun à tous soit
justement QUE la peur. Une peur qui isole.
Parce que l’Etat n’exerce plus, contrairement à sa vocation, une protection
contre les menaces pesant sur l’intérêt général, le bien commun, et les
Droits de l’Homme.
Nous continuons à nous battre pour le retrait du protocole agréé le 6 août,
re-signé le 13 novembre, et pour l’ouverture de véritables discussions avec
tous ceux que ces réformes concernent en préalable à toutes renégociations.
Cet accord destructeur, inique, illégal, inefficace, qui cible nos
professions provoque une mobilisation sans précédent. Nous voulons mettre
cette force au service de tous pour sauvegarder ce que l’Etat ne défend plus
et défendre ce qu’il attaque.
Cette brutalité nous a amenés à prendre conscience de la rapidité avec
La quelle ce gouvernement s’engage dans un processus qui se veut irréversible
de dégradation, de destruction des droits sociaux, sur le plan national,
européen et mondial.
On a fait de nous des boucs émissaires, nous désignant comme des privilégiés, des incompétents, des profiteurs.
Ni la voix des artistes et des techniciens, ni celle des chercheurs, des
enseignants, des infirmières, des futurs retraités, des architectes, des
médecins urgentistes, des archéologues, des sans papiers, des victimes des
licenciements massifs, des cheminots, des routiers, des postiers, des
demandeurs d’asile, des chômeurs...
Aucune des voix qui se sont élevées récemment, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, n’ont été entendues ou même prises en compte.
Nous ne voulons pas d’une société où la certitude de périodes d’emploi discontinu serait assortie d’une incertitude sociale maximale.
Nous ne voulons pas de ce modèle, le RMA, ce Retour au Moyen-Âge et ses formes d’asservissement féodal aux employeurs, les seigneurs de l’économie.
Nos voix s’adressent à vous.
Il est encore temps d’agir, de voir, de dire, de penser, de créer, de travailler à une inversion de ce processus qui met à mal la démocratie.
Nous vous appelons à devenir acteurs.
CE QUE NOUS DEFONDONS, NOUS LE DEFENDONS POUR TOUS.
2 rendez-vous :
Le samedi 6 décembre, manifestation contre la précarisation et l’exclusion
sociales à l’appel des organisations de chômeurs et des coordinations et
collectifs d’intermittents, Place Denfert-Rochereau à 14 h30.
Le lundi 8 décembre, manifestation nationale intersyndicale pour
l’abrogation du protocole et l’ouverture de réelles négociations, Place du
Panthéon à 14 heures.